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#BritamPapers – Bhadain, dindon de la farce ? Ou Peter Munga trop « malin » ?

On serait tenté de rejoindre la Commission d’enquête sur Britam que tout ce qui s’est déroulé autour de la vente de Britam, le mystère entourant Plum LLP et la façade du « pool of investors » ressembleraient à une mise en scène d’une production cinématographique.

Le scénariste, alors, ne serait autre que l’ex-ministre Bhadain. Mais l’homme aux multiples casquettes qui aurait cumulé à la fois le rôle d’acteur principal, de producteur et de réalisateur se nomme Peter Munga. Parce que, finalement, c’est lui, le véritable acquéreur des actions Britam à travers Plum LLP, une société créée trois mois après le ‘deal’ conclu le 12 mars 2016 à Maurice ; et aussi celui qui les a revendues à prix d’or deux ans plus tard. Voyons les faits.

Le ministère des Finances avait initialement approuvé le principe que la vente des actions soit effectuée en faveur de MMI Holdings pour un montant de Rs 4,3 milliards ; offre faite depuis le 17 avril 2015. MMI Holdings, qui avait évalué les actifs à Rs 4,5 milliards en avril 2015, avait en effet proposé de les acheter à Rs 4,2 milliards. Mais après négociation avec le ministère des Finances, l’offre avait été portée à Rs 4,3 milliards, sous réserve qu’un exercice de « due diligence » soit conduit sur MMI Holdings.

Intervient alors Henry K. Rotich, secrétaire au cabinet du gouvernement kenyan qui fait une requête pour que Britam soit vendue aux Kenyans.

Le ministère des Finances avait agréé à la requête, mais à une condition : que les Kenyans s’alignent sur le prix de Rs 4,3 milliards ou proposent mieux que ce montant.

Mais comme se le demande la Commission d’enquête, « Who finally was the buyer ?”. La réponse est choquante : “ It was Plum LLP, formed and registered on the very day of the sale : 10 June 2016, with Mr Peter Kahara Munga as the Manager of Plum LLP.”

Peter Munga n’est autre que celui qui avait rencontré Roshi Bhadain, par les bons soins de Afsar Ebrahim à son bureau un 14 novembre, le temps d’une visite de 48 heures à Maurice. C’est pour cette raison, il est important de rappeler que dans un de nos articles sur #BritamPapers que nous évoquions la remarque selon laquelle le rapport avait dit : « “ It is this meeting that changed the history of this transaction”.

C’est le 30 juin 2016 que le pot aux roses a été découvert, c’est-à-dire le nom de l’acheteur : Plum LLP. Selon les détails obtenus, la société Plum LLP avait été enregistrée, le 10 juin 2016 en vertu de la Limited Liability Partnership Act No. 2011 (selon les lois du Kenya) avec le numéro d’enregistrement LLP/2016/65 et de P.O. Boîte 556-0060, Nairobi Kenya.

Qui en faisait partie ? Regardez le document ci-contre :

Il y avait-il réellement un « pool d’investisseurs » lorsque les autorités Kenyanes ont demandé au gouvernement mauricien de considérer que Britam soit vendue aux Kenyans vu qu’il y avait un « pool d’investisseurs » qui y était intéressé ?

Voici ce que dit la Commission d’enquête : « “The mystery around “a pool of investors” mentioned in the MOU would come to light only then. There was no pool of investors finally. It was all the set-up of one person and one person only. He happened to be the key actor, the producer, the director and the funder of the film : Mr Peter Munga. He was the real purchaser of the Britam shares. Had a CDD been done by the Mauritians involved with a simple question “who was behind the pool of investors” ? ”

Le plus intéressant – ou le pire dans cette histoire – c’est que, aussi étrange que cela puisse paraître, ni Roshi Bhadain, ni ses conseillers, n’ont pu remarquer que le « pool » d’investisseurs n’était qu’une façade de Peter Munga, selon la Commission d’enquête, pour duper au grand jour les gros cerveaux mauriciens.

Pourquoi ? Tout simplement parce que les associés indiqués dans le document publié plus haut ne sont que, en premier lieu, l’épouse de Peter Munga (Rose Kahara Munga), et Pioneer International University Trust, organisation composée de Peter Munga lui-même, sa femme et ses enfants.

La commission établit que toute la démarche de Peter Munga, orientée vers l’achat des actions de Britam, a été habilement opérée derrière le voile du terme « pool » d’investisseurs, une entité non-légale qui est devenue Plum LLP qu’au jour de l’achat le 10 juin 2016. Comprenez par là que l’accord signé le 12 mars au ministère de la Bonne gouvernance que dirigeait Roshi Bhadain et l’équipe de Peter Munga « was not a legally binding document ». Donc, légalement, Plum LLP n’existait pas !

Pour l’ancien juge qui préside la Commission d’enquête, ce jeu de façade aurait pu être évité si les bonnes questions avaient été posées dès le départ. C’est également pour cette raison que la Commission avait posé un certain nombre de questions aux témoins kenyans en utilisant la voie diplomatique. A un moment, ils avaient accepté de coopérer à l’enquête. Par la suite, ils ont disparu du radar !

« After an initial commitment from the Kenyans and a first written communication, they conveniently moved out of the radar. Finally, the Commission issued a Salmon notice to each of them, to no avail. It is still awaiting their response (…) It is a matter of regret that the Kenyan witnesses were all talk and little walk. However, their relative reticence to collaborate and co-operate has not stopped the Commission from getting to the bottom of things even if a viva voce hearing of them would have made the conclusions of the Commission doubly certain.”, ajoute le rapport Domah.

A ce chapitre, le constat de la Commission d’enquête est encore moins diplomatique quand elle avoue que c’est une « matter of deeper regret » quand il est constaté que ce sont les autorités kenyanes qui avaient demandé la coopération de Maurice pour vendre les actifs de Britam aux actionnaires kenyans et au lieu de les vendre aux Sud-Africains. Maurice, insiste-t-elle, s’était pliée en quatre pour ce faire. « But when Mauritius sought to find out what happened and how, the Kenyans failed to reciprocate. Yet reciprocity is the rule in bilateral relations between two friendly countries », regrette-t-elle.

Mais qu’importe, ces éléments nous amènent à une question : comment Roshi Bhadain et son équipe, en sus de toute l’armada dont il disposait quand il était ministre, de même que les autorités kenyanes et actionnaires de Britam, ne se sont-ils pas demandés qui pouvait bien faire partie de ce « pool of investors » et qui était derrière Plum LLP ?

Bizarre, vraiment bizarre… C’est le cas de le dire, car si aucun « file, minute or record » n’a pu être retracé du côté du ministère de la Bonne gouvernance où tout, semble-t-il, « se faisait au téléphone » en toute normalité, on apprend en même temps que c’est cette semaine que la Capital Market Authority du Kenya – autorité régulatrice au Kenya et équivalent de la FSC à Maurice – a décidé d’instituer une enquête sur l’achat de Britam par le richissime homme d’affaires Peter Munga. Cela, cinq ans après !
Au regard des faits, il est à se demander si, ici à Maurice, on recherche toujours le scénariste… ou le dindon de la farce ?

Le grand gagnant reste, pour l’instant, Peter Munga ! L’histoire nous dira sans doute, tôt ou tard, si « the Kenyans either duped the Mauritians or made a covert deal which is rather intriguing ».

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